L'Évolution des relations franco-algériennes
Le début du XVIe siècle représente un tournant dans l’histoire, une menace claire représentée par le danger européen qui s’est abattu sur les pays arabes du Maghreb, et plus particulièrement sur l’Algérie. Les pays européens, la France en tête, convoitent l’Algérie pour sa situation au sommet de la Méditerranée, un carrefour entre l’Orient et l’Occident.
La compétition pour les colonies commence, chaque pays poursuivant ses intérêts et ses objectifs. L’orientation française vers l’Algérie était notablement prononcée.
La France considérait l’Algérie comme un but qu’il fallait acquérir à tout prix. Après avoir pris contrôle des récifs coralliens pendant la période ottomane, l’histoire des relations entre l’Algérie et la France révéla que l’avidité et le désir de la France pour l’Algérie ne cessaient d’augmenter.
Cela avait ouvert la porte à la France pour planifier et mettre en œuvre ses plans. Quelle était donc la nature de ces relations ?
Les relations franco-algériennes au XVIIe siècle :
Depuis le 17ème siècle, les relations franco-algériennes connurent plusieurs étapes, et nous constatons que les relations de l’Algérie avec la France étaient généralement bonnes, cela est évident dès le début du 16ème siècle.
Un accord d’amitié et d’alliance était conclu, le premier avec l’Algérie en 1534 et le deuxième avec l’Empire ottoman, selon lequel la France avait obtenu des privilèges pour ses navires, sa navigation son commerce et ses consuls qui se trouvaient en Méditerranée et en Algérie.
Grâce à ces relations amicales, la France instaura des établissements commerciaux comme à Annaba, El Kala et Collo.
En 1577, les Français purent nommer un consul pour eux à Alger, puis, au cours de l’année suivante, ils ont pu l’obtenir en cherchant du corail sur les côtes orientales de l’Algérie et ils l’ont nommé « Bastion France ». En 1604, les Turcs étaient mécontents du fait que la France achetait du blé des habitants et le vendait à l’Europe, ils ont donc démoli le centre commercial français en 1604.
Ces étapes peuvent être identifiées comme suivi :
Ø Première phase : avant le Traité de Paix Centenaire de 1689:
Cette période est marquée par plusieurs traités de commerce et de sécurité.
Le traité était signé le 21 mars 1619, après que la délégation algérienne s’est rendue à Marseille et cela sous la direction de Sinan Agha. Elle était accompagnée d’un grand nombre de marchands algériens et les autorités de cette ville, y compris les consuls et les administrateurs, ainsi que le gouverneur de la province de « Provence » le duc De Guise. Le traité stipulait ce qui suit :
1. Respect par les deux parties des traités conclus entre l’Empire ottoman et la France.
2. La cessation de l’inspection des bateaux et des navires de marine par les marins algériens.
3. La restitution des deux canons qui ont été volés par la France de l’Algérie et les remettre à la délégation de Marseille.
4. La libération des prisonniers des deux parties dans un délai de trois mois après la signature du présent accord, à condition que l’un des ressortissants des deux pays reste en situation de détenu dans l’autre pays.
5. La libération de 35 détenus algériens.
Malgré tout, ce traité était un échec, après le terrible massacre qui s’est produit contre l’expédition algérienne. Les déclarations de sources françaises concernant le nombre de victimes de ce massacre varient et certains l’estimaient à quarante morts, d’autres l’estimaient à cinquante morts.
Les Marseillais apprirent la conquête d’un de leur navire par Rais Ragab, le chef de la délégation Sinan Agha et ses compagnons ont été alors tués, mise à part 12 personnes qui étaient à l’extérieur de la maison le 14 mars 1620. À la suite de cela, la tension augmente de nouveau dans la relation des deux parties et devant la protestation du Dey.
Henri IV n’a cessé de poursuivre les criminels.
- Le traité de Sanson Napollon 1628 :
Le roi de France Louis XIII avait choisi pour cette tâche Sanson Napollon après
Son retour de sa mission en Orient en juin 1626, afin de négocier avec les Algériens en ayant les deux canons, ceci était la raison du retard de Sinan Agha à Marseille avec un nombre de détenu algériens.
Ces négociations ont duré une année entière et se sont achevées à la fin de juillet 1627. Sanson était retourné en France pour présenter le projet de traité au roi et au cardinal de Richelieu.
Le roi avait ratifié l’accord et au 19 septembre 1628, le traité fut signé et stipula ce qui suit :
1. La libération des prisonniers des deux côtés.
2. La cessation de la réquisition des navires français par des marins algériens.
3. Les deux parties s’engagent à empêcher la pratique de la captivité et de l’esclavage.
4. Respect du grade du consul français par les Algériens.
5. Il est inadmissible de contraindre un Français à quitter sa religion par force et à se convertir à l’islam.
6. L’octroi du privilège de l’exploitation du Bastion, de le lui accorder à titre personnel et non pas en tant que représentant et accrédité auprès du roi de France.
Sanson a réouvert El Kala, Annaba, et un centre pour le commerce du blé près de Tabarka, en Tunisie. Il rouvre également la forteresse du Bastion au service de ses intérêts personnels.
Puis, les marchands de Marseille se révoltent en attaquant 3 navires de commerce algériens, capturant leurs passagers. De plus, et en réponse à ces actes, les Algériens capturent le consul français Rico et tous les résidents français en Algérie.
Ils attaquent les navires français, si bien que les Marseillais perdent environ 4.725.000 livres. Le Parlement de Marseille ordonne alors à Richelieu de diriger les forces navales vers les eaux de l'Algérie pour libérer environ 3.000 prisonniers.
Le Traité de Paix et la Concession de Bastion :
Malgré la préoccupation de l’Algérie pour assurer la protection et la sécurité du commerce français dans le Bastion et ses extensions et malgré aussi la situation de crise ainsi que l’arrivée d’un des officiers français, le vice-amiral Martin au bord d’un petit navire sous pavillon blanc, mais le traité a quand même été signé le 7 juillet 1640.
Le Pacha avait envoyé au vice-amiral Martin des honneurs traditionnels à deux reprises, en lui demandant d’accéder au port avec toutes les garanties de ses intentions pacifiques.
Ce dernier répond à cette initiative en naviguant et en hissant le drapeau rouge sur les mâts de ses navires.
Cet acte était considéré comme un symbole de déclaration officielle de guerre par les Français. Le vice-amiral Martin avait été saisi après avoir quitté le mouillage avec deux bateaux algériens venant de Tunisie, mais le Pacha envoya un message avec Dukukil qui supervisait les chefs des Bastions, déclarant : « L’Algérie est toujours en paix avec lui et qu’elle maintient toujours les dispositions du traité de 1628 ».
Louis XIV répondit en soulignant que l’Algérie se considère jusqu’à présent en état de paix avec lui. Il répondit en affirmant cela et s’en était remis à Dukukil pour effectuer des négociations avec les autorités algériennes afin de conclure un nouveau traité de paix.
Ils signent un traité le 07 juillet 1640, convenu de ce qui suit :
1. la libération mutuelle des prisonniers.
2. Le retour des marchands du Bastion à leurs postes.
3. La cessation de l’inspection des navires français et des ressortissants français qui se trouvent sur les navires des ennemis de l’Algérie.
- Le traité d’exploitation du Bastion de 1661 :
En 1640, M. de Coquille a obtenu le privilège d'exploiter le Bastion, avec un contrat personnel, mais il y renonce en faveur de Thomas Becky. Ce dernier profite de la confiance des gens et s'empare de leurs produits et marchandises, qui coûtent des sommes énormes, puis s'enfuit en 1658, enlevant environ 80 personnes pour les vendre.
Les autorités françaises se sont empressées de remédier à la situation avec un envoyé spécial en Algérie qui était Louis Cambon en 1659 à cette fin, avec une lettre de recommandation de Louis XIV, afin de libérer les personnes enlevées et vendues par Thomas Becky ainsi que le paiement des dettes.
Au début de 1661, une autre délégation a été envoyée et un autre traité a été signé la même année.
Ø Deuxième phase : Traité de Paix Centenaire de 1689:
La France remplace l'amiral Duquesne par l'amiral Dautreville, lorsque deux traités sont signés avec Dessaux et Tréville les 23 et 25 avril 1684 sur l'établissement de la paix entre les deux pays.
La tension entre les deux pays a commencé lorsque la marine algérienne s'est emparée en 1687 de la côte de la capitale, et il s'est avéré que le navire portait un passeport signé par l'amiral français.
Par la suite, le roi Louis XIV a nommé Dostry pour diriger une grande campagne militaire qui a bombardé la ville d'Alger jusqu'à la mi-septembre. Les Algériens ont arrêté le consul français et sa brigade et les ont tués le 25 septembre 1689.
Pendant cette période, un ingénieur français nommé Ricard a suggéré d'envoyer une campagne terrestre pour occuper l'Algérie, mais le roi français Louis XV (1715-1774) qui préférait utiliser des moyens pacifiques plutôt que la violence.
D'autres projets personnels apparaissent durant cette période pour occuper l'Algérie, notamment le projet de Dekercy, qui était consul général en Algérie. Ce dernier présenta un long rapport au greffier de l'État maritime, qui n'était autre que le marquis de Castries.
En 1789, date du succès de la Révolution française, alors qu'un blocus européen était imposé à la France, cette dernière ne trouva personne pour l'aider sauf l'Algérie qui, lui fournissait du blé et lui assurait des livraisons de grains et de produits alimentaires.
Le Dey avait également écrit à Napoléon après sa prise de pouvoir en France, selon le récit d'Asker dans son livre "La prise d'Alger" : "... il vous est impossible de subir une guerre sans rencontrer des difficultés pour vous fournir des denrées alimentaires et autres éléments nécessaires et dans ces conditions nous vous tendons la main, pour vous exprimer notre infinie générosité et notre profonde émotion...".
Au temps de Napoléon Bonaparte qui tentait de mener une politique d'apaisement avec l'Algérie, il tenait à poursuivre les bonnes relations avec l'Algérie, mais il les détériora avec sa campagne contre l'Egypte en 1798. En effet, le dey de l'Empire ottoman, capture le consul français à la Casbah en détruisant le centre d'El Kala et les flottes algériennes commandées par Raïs Hamidou qui, envahissent les côtes françaises.
Ø Troisième phase :la signature de l’armistice avec la France en 1800 jusqu’à la chute de Napoléon
Depoata Neville arrive à son poste avec plusieurs difficultés. Les premiers contacts officiels établis par le consul en Algérie par l'intermédiaire du marchand Bakri sont encourageants et ouvrent la voie au début des discussions officielles entre les deux parties qui commencent le 15 juillet 1800. Un armistice est conclu avec la France, qui n'est pas reconnu par l'Angleterre et l'Empire ottoman. De même en 1802, le traité de paix d'Amiens est signé en mai, ce qui met fin à la guerre entre les Etats coalisés, dont l'Empire ottoman d'une part, et la France d'autre part. Concernant la question des dettes, un accord a été conclu par lequel la France a reconnu la restitution des dettes à l'Algérie. En janvier 1802, un navire de la marine transportant un certain nombre de voyageurs à Saint-Domingue s'échoue à la suite d'une tempête sur la côte algérienne, près de la ville de Tennes.
Le consul envoie une réponse ferme au Dey, tout comme Napoléon Bonaparte, qui répond par des menaces et des intimidations, en demandant au Dey de restituer les deux navires que le gouvernement algérien a saisis. La réponse du Dey était favorable, et à la fin de la lettre, il citait : " Nous espérons que les dettes françaises envers le Bakri seront réglées, car une partie de celui-ci m'appartient, et votre consul, Depoata Neville, me l'a promis. J’attends votre retour. »
La défaite de Napoléon Bonaparte à la bataille de "Waterloo" en 1814 qui met fin à son désir d'annexer l'Algérie. Cette défaite rétablit effectivement la monarchie en France, la famille des Bourbons accédant à nouveau au trône de France. Après la conférence de Vienne en 1815, qui n'a pas oublié à son tour l'objectif de ses premiers souverains d'annexer l'Algérie. Pour dissimuler ce rêve, cette famille tente une tactique d'apaisement en rétablissant des liens entre les deux parties.
Ø La Quatrième phase : Du retour de la Royauté, à sa présence en Algérie en 1830
Après le retour de la famille des Bourbons au pouvoir et la chute de Napoléon Bonaparte, la France tente de rétablir des relations diplomatiques et économiques en profitant de la conjoncture internationale en général, notamment de la guerre navale menée par l'Angleterre contre l'Algérie, sous la direction de Lord Exmouth, en 1816.
Le Congrès d'Aix-la-Chapelle se tient en 1818, au cours duquel la France aspire à coloniser et à retrouver sa place parmi les grandes puissances comme l'Angleterre et la Russie. La restauration de la monarchie en la personne de Charles X en 1844 exacerbe la situation pour les royaux exilés qui reviennent en France pour récupérer leur autorité et punir ceux qui ont traité avec le régime révolutionnaire.
Par ailleurs, un certain nombre de relations franco-algériennes doivent être soulignées, parmi lesquelles l'intervention juive dans les relations algéro-françaises est représentée par les juifs "Bakri" et "Bouchnak", pour qui la majorité du commerce algérien était monopolisée, et qui ont joué un rôle politique important dans la campagne de 1793-1800.
La France fait respecter le blocus de l'Algérie en y plaçant une partie de sa flotte. L'embargo ayant drainé l'économie française, celle-ci s'est vue contrainte de chercher une solution à ce problème. Depuis lors, le gouvernement français cherche les motifs qu'il a utilisés pour coloniser l'Algérie, notamment l'épisode du fouet volant de 1827, que la France a utilisé pour justifier ses objectifs.
Sinon, comment expliquer les incidents majeurs qui se sont produits entre les deux nations avant l'accident du ventilateur ? Cependant, la réponse de la France à l'Algérie n'a pas été violente. Le Dey Hajj Ali a humilié le consul français en Algérie en 1810, mais la France n'a pas exercé de représailles violentes. C'est un drame dont les fils ont été cousus à huis clos. Charles X s'en sert pour prendre une ordonnance royale le 7 février 1830, qui contient la nomination du comte "de Bourmont" comme commandant de l'opération contre l'Algérie. Il organise ses troupes et s'embarque du port de Toulon en juin 1830, occupant la capitale, Alger, le 5 juillet 1830, déclarant ainsi l'occupation et la colonisation françaises de l'Algérie.
En résumé, 57 traités ont été signés entre la France et l'Algérie entre 1619 et 1830. D'un côté, les relations étaient marquées par l'instabilité et l'éloignement, de l'autre par la conspiration française et la volonté de l'Algérie de maintenir la paix avec la France.